Un an
Jean Echenoz
Editions de Minuit, 1997.
110 p.



"Victoire, s'éveillant un matin de février sans rien se rappeler de la la soirée puis découvrant Félix mort près d'elle dans leur lit, fit sa valise avant de passer à la banque et de prendre un taxi vers la gare Montparnasse."
Le court roman de Jean Echenoz commence ainsi. Ce premier paragraphe nous apprend beaucoup de choses sur la ligne stylistique qu'adopte l'auteur dans Un an. Le narrateur est complètement extérieur à l'action. Il ne se met jamais à la place de l'héroïne, Victoire, puisque l'on n'apprend rien de ses émotions. Victoire découvre son compagnon mort à ses côtés, elle fuit. Est-elle choquée, indifférente ? On ne le sait pas. Tout le roman est ainsi fait ; Echenoz donne dans le descriptif. Seule l'action compte, mais à travers elle, on parvient à discerner, en transparence, par instants, la personnalité de Victoire. L'action, quant à elle, est, au fond, simple et linéaire : Victoire fuit avec une somme d'argent conséquente en poche, elle voyage à travers la France (surtout du côté de l'Aquitaine), vit dans des hôtels, loue une maison. Elle rencontre un homme, se lie avec lui mais celui-ci lui dérobe son argent, et c'est la déchéance. Victoire va peu à peu se clochardiser... Mais ce n'est pas fini ! Lisez ce superbe, cet inclassable roman de Jean Echenoz . Un roman empreint d'une poétique extraordinaire, d'un style étranger à tout académisme où le temps, la syntaxe, les mots sont soumis aux pires tortures pour notre plus grand bonheur.
I.L.